Checkier Photo de Paris : L’homme derrière l’objectif, entre passion, patriotisme et diaspora
Dans les coulisses des stades européens, dans l’intimité des artistes de la diaspora ou au détour d’un retour au pays natal, un nom revient toujours sur les lèvres : Checkier Photo de Paris. De son vrai nom Sawadogo Soumaila, ce jeune Burkinabè installé en France s’est imposé au fil des ans comme l’un des photographes les plus en vue de sa génération. Mais derrière l’image publique, se cache une histoire de passion, de résilience et d’attachement profond à son pays d’origine.

De l’enfance à la passion née en Europe
Originaire du Burkina Faso et ayant grandi en Côte d’Ivoire, Soumaila a grandi dans un univers loin des projecteurs. C’est en arrivant en Europe qu’il découvre véritablement la photographie. Une rencontre presque fortuite, mais qui va bouleverser sa vie. « Je suis tombé amoureux de la photo une fois arrivé en Europe. C’était plus qu’un simple passe-temps, ça s’est transformé en passion », raconte-t-il.
Ce choix, il l’assume pleinement. Paris, capitale de l’art et carrefour mondial des cultures, devient son terrain de jeu et d’apprentissage. Pour lui, c’est l’endroit idéal pour approcher des personnalités, des artistes et des sportifs. Un pari audacieux, mais nécessaire pour se faire un nom dans un milieu aussi compétitif que la photographie.
Un regard façonné par ses racines
Si son quotidien se déroule entre l’Europe et l’Afrique, ses origines burkinabè restent au cœur de son identité visuelle. L’éducation et les valeurs reçues au Burkina Faso façonnent son regard, son approche et même son rapport aux sujets photographiés. « Les bases que m’ont données le Burkina et mon enfance en Côte d’Ivoire m’ont beaucoup aidé », dit-il avec reconnaissance.
Et ce regard singulier se traduit dans sa quête artistique. Plus qu’une simple capture d’instant, Checkier cherche « l’âme des personnes » : ce petit quelque chose qui dépasse le visible et que seul l’objectif peut immortaliser. Joie éclatante, tristesse silencieuse ou espoir fragile : il veut que, même à 10.000 kilomètres, un inconnu puisse ressentir l’émotion vécue sur la photo.

Des clichés qui racontent une histoire
Au fil des années, certains clichés sont devenus pour lui des repères intimes et professionnels. Celui de sa mère, par exemple, avec ce sourire qui l’a marqué à jamais. Ou encore cette photo prise du président Ibrahim Traoré, de retour de Russie : « Au moment où je me suis accroupi pour le photographier, il a regardé directement l’objectif avec un sourire. Cette image restera gravée dans ma mémoire. »
Mais au-delà des grandes figures, il y a les sportifs, notamment les Étalons du Burkina Faso. Sans contrat officiel avec la fédération, il s’est rapproché naturellement de plusieurs joueurs. Pour lui, c’était une évidence : « En tant que photographe, je voulais rayonner l’image du Burkina à travers ses ambassadeurs. » Ses clichés témoignent d’une complicité sincère avec ces athlètes devenus des amis, mais aussi d’un patriotisme profond.
La photographie comme acte de résistance
Dans un Burkina Faso marqué par une crise sécuritaire persistante, Checkier voit la photographie comme un outil puissant. Pour lui, l’image est loin d’être neutre : elle peut soutenir, encourager, galvaniser. Ses photos de soldats en témoignent. « Certains FDS au front m’envoient des messages après avoir vu mes clichés. Ils me disent que ça leur donne de la force, ça les valorise. C’est une forme de solidarité qui passe par l’image », explique-t-il.
Et lorsqu’on lui demande s’il accepterait d’enfiler le treillis symbolique du photographe de guerre, sa réponse est sans détour : « Ce n’est même pas une demande. Ne soyez pas étonnés de me voir un jour au front avec ma caméra. Pour moi, c’est un devoir. »

Un métier de passion, mais semé d’embûches
Derrière l’apparente réussite, le chemin n’est pas sans obstacles. Matériel coûteux, formations limitées, difficulté à se faire reconnaître en Afrique : les défis sont nombreux. Mais Checkier préfère retenir les progrès accomplis. « Hier, on disait qu’un photographe était un fainéant. Aujourd’hui, de plus en plus de jeunes assument fièrement ce métier. »
Il cite volontiers des confrères burkinabè qui émergent avec talent : Sambiga Waambi, Pouiré Photo, Bruno Kiemtoré, Maneq Photo, Souleymane… autant de noms qui, selon lui, prouvent que la photographie burkinabè est en marche.

Entre Paris et Ouagadougou : des projets en gestation
Toujours en mouvement, Checkier Photo refuse de se limiter à un seul territoire. Très attaché à son pays, il multiplie les allers-retours entre la France et le Burkina Faso. Pour lui, il ne suffit pas d’appeler la diaspora à revenir : il faut soi-même donner l’exemple.
Parmi ses projets, certains restent confidentiels, « pas encore assez cuits » dit-il en souriant. Mais son ambition est claire : contribuer à structurer le secteur. L’idée d’une école de photographie au Burkina Faso ou en Afrique fait partie de ses rêves. Une manière de transmettre et d’offrir aux futures générations ce qu’il n’a pas eu au départ.

Un message aux jeunes et un vœu pour l’avenir
Aux jeunes photographes africains, il livre un conseil simple mais puissant : travailler sans relâche, même quand la reconnaissance tarde. « Ce que nous gagnons aujourd’hui, nos petits frères gagneront davantage demain. Mais cela dépendra de notre capacité à sacrifier, comme nos devanciers l’ont fait pour nous. »
En conclusion, Checkier laisse parler son cœur. Son plus grand souhait reste que la paix revienne au Burkina Faso. « Nous voulons que ce pays soit un eldorado, pas seulement pour les Burkinabè, mais pour toute l’Afrique. » Derrière son objectif, entre Paris et Ouaga, il continue d’écrire cette histoire en images, convaincu qu’une photo peut changer un regard, et parfois même un destin.
Par Vox Sahel

