Recherche agricole et nutrition : Zakaridja Sawadogo valorise les espèces locales de corchoruspour renforcer la sécurité alimentaire
Zakaridja Sawadogo a soutenu, le mercredi 23 juillet 2024 à l’Université Joseph Ki-Zerbo, une thèse de doctorat unique en génétique et amélioration des plantes. Le thème de ses travaux, « Diversité génétique et connaissance endogène des espèces du genre Corchorus au Burkina Faso », a suscité l’intérêt pour sa portée à la fois scientifique et sociétale. Le jury lui a décerné la mention très honorable, saluant une recherche rigoureuse, bien ancrée dans les enjeux nutritionnels du pays.

Dans un amphithéâtre de l’Université Joseph Ki-Zerbo, l’émotion était palpable ce 23 juillet. Famille, collègues, encadreurs, étudiants et curieux sont venus nombreux assister à la soutenance d’un travail de recherche qui remet au goût du jour une plante traditionnelle tombée dans l’oubli. Une plante que beaucoup consomment sans toujours en connaître les richesses ni le potentiel.
Localement connue sous le nom de Boulvanca en mooré et souvent désignée en français comme « carotte potagère », la plante Corchorus, aux feuilles mucilagineuses très utilisées en cuisine, a été au cœur de cette étude. Le doctorant Zakaridja Sawadogo a exploré quatre espèces principales : olitorius, capsularis, aestuans et trilocularis. Seule la première est véritablement valorisée par les populations.
« Nous avons démontré que d’autres espèces, souvent négligées, sont pourtant très riches en éléments nutritifs, notamment en sels minéraux », a souligné ZakaridjaSawadogo.

D’après lui, une meilleure valorisation de ces espèces pourrait significativement contribuer à renforcer la sécurité nutritionnelle, particulièrement en milieu urbain, où l’alimentation est souvent dominée par les produits transformés. Pour mener à bien ses recherches, près de 200 échantillons ont été collectés à travers le Burkina Faso.
Toutefois, en raison de contraintes logistiques et de la durée réglementaire de trois ans pour la thèse, seuls 100 échantillons ont pu être analysés, comme l’a précisé la directrice de thèse, Pr Kando Pauline Bationo. Ces derniers ont été multipliés sur le terrain et suivis à trois reprises, totalisant ainsi 300 parcelles expérimentales. Elle a également mentionné que les analyses biochimiques, coûteuses, ont été concentrées sur les quatre espèces les plus représentatives.
« Si nous avions disposé de plus de temps et de ressources, nous aurions pu étendre les analyses à tous les échantillons », a-t-elle regretté, tout en se disant satisfaite des résultats. La soutenance, qui a duré quatre heures, a permis au candidat de présenter ses travaux en profondeur et de discuter avec les membres du jury des perspectives de vulgarisation et de valorisation de ces espèces locales.
Le Professeur Mahamadou Sawadogo, président du jury, a salué le sérieux du travail présenté. « L’impétrant a répondu de manière satisfaisante à toutes les questions posées. Son travail apporte une contribution importante à la valorisation des ressources locales pour l’autosuffisance nutritionnelle », a-t-il déclaré.

Le nouveau docteur souhaite voir ses résultats largement diffusés, tant auprès des décideurs que du grand public. Il espère contribuer à changer le regard porté sur les espèces locales sous-exploitées. « Plus ces espèces seront cultivées, plus elles perdront leur caractère sauvage et seront acceptées par les ménagères et les marchés», a expliqué sa directrice de thèse.
Dans un message adressé aux jeunes chercheurs, Zakaridja Sawadogo a lancé un appel à la persévérance : « Ce n’est pas toujours les meilleurs qui avancent, mais ceux qui tiennent bon. Il faut du courage, car la recherche n’est pas facile, surtout avec les moyens financiers limités. »
La soutenance a aussi bénéficié de la participation à distance de deux professeurs titulaires : le Pr Alexandre Dansi Anagonou de l’Université d’Abomey-Calaviau Bénin et le Pr Harouna Issa Amadou de l’Université Abdou Moumouni du Niger. Tous deux ont activement pris part aux échanges en tant que membres du jury.
La distinction académique obtenue par Zakaridja Sawadogone marque pas une fin, mais plutôt un point de départ. Il appartient désormais aux chercheurs, aux décideurs politiques, aux agriculteurs et aux consommateurs de s’approprier ces résultats pour qu’ils sortent des laboratoires et s’ancrent durablement dans les habitudes alimentaires burkinabè.

